2020 Débri(s)collages
Du 20 mars 2020 au 30 juin 2021
17 mars 2020, premier jour du premier confinement. Un jour de fête sans fête. A cette date, j’ai entrepris d’empiler le quotidien (journaux) pour en faire des mois jusqu’à ce jour mais pas seulement. Je suis lecteur et collagiste à mes moments perdus. Six mètres carrés, un panneau d’affichage revêtu des restes colorés et déchirés d’un affichage précédent. Entre les quotidiens imprimés et cette surface, je me suis imposé un travail de Sisyphe. Bien loin de m’infliger un châtiment, c’est la signification qui m’intéresse. A juste titre, ce sont les chapeaux des articles faisant référence à la covid19 qui ont retenu mon attention. Je lis, je feuillette, je découpe et j’accumule ces morceaux du quotidien. Je dépèce sans être couteau. De juillet à octobre, je taille et je colle. Trente deux heures passées à classer, à tourner les pages une par une, à séparer les titres des articles, puis à les coller un par un sur cette étendue. Au fur et à mesure de l’avancement, je photographie ce canevas de mots imprimés tissant une géographie partielle du monde. Parfois une pluie sévère m’offre une récompense inattendue. Le travail réalisé devient tout à coup transparent et révèle la « toile » qui sert de support aux bandes assemblées, sans barrière. Fin octobre, la surface du panneau n’est pas entièrement recouverte ! Le nouveau confinement vient à ma rescousse. Je continue donc d’entasser le quotidien pour opérer à nouveau début mars. En attendant, le travail réalisé en extérieur est laissé à l’abandon pour quelques mois. La pluie et le vent lutteront mot à mot plutôt que pied à pied pendant cette pause imposée. Mars 2021, retour avec la pile de journaux conservée, à savoir novembre ; décembre pour 2020 et janvier et février pour 2021. Les collages laissés à l’abandon pendant cette période de quatre mois ont tenu le coup. Le rituel reprend, découpage et assemblage. Je continue à égrener le quotidien. La surface publicitaire du panneau d’affichage disparaît tout doucement. Le 22 juin, sous les assauts répétés de la pluie et du vent, l’affichage humidifié se décolle. Une fois le papier asséché, je découpe les six mètres carrés en huit panneaux de 70 cm x 100 cm. Je décide d’arrêter ce travail de bénédictin le 30 juin 2021.
Patrice Monchy – octobre 2021