2016 - Pirou, AV, JR et les 6 mercenaires

14 Juin 2016 - 11:57

Photographies > Patrice Monchy, le 12 juin 2016

Agnès Varda, JR et les 6 mercenaires à Pirou (Manche fr - 50), sur le même lieu, à des dates différentes, avec des projets distincts.

« A Pirou, le village fantôme va disparaître » (1)

Ce lieu voudrait mais ne peut pas s’ajouter à la liste des villages abandonnés car il n’a jamais été habité, nous sommes donc loin des villes fantômes aux États-Unis. Reportons-nous vingt-cinq ans en arrière. Un promoteur immobilier, peut-être hollandais, descendu, par temps de brouillard, d’un vaisseau croissant au large. Il est propriétaire d’un terrain situé sur la dune bordant la mer. Soixante- quinze maisons, un hôtel, des terrains de tennis en font saliver plus d’un dans les landes. Ces territoires parcourus de préférence dans la brume par les mots de Barbey d’Aurevilly échappés de L’ensorcelée. La pièce de théâtre se met en place, un promoteur, un projet, des entreprises, des investisseurs et des banques. Vingt-cinq maisons sortent rapidement de terre. Fin du premier acte et fin tout court. Les fantômes, les vrais, peuvent maintenant envahir le chantier surtout la nuit. Tout d’abord les pilleurs, «  fenêtres, portes, toitures disparaissent en quelques jours ». En quelques jours, l’ensemble n’est plus qu’un lotissement fantôme. Les bombeurs s’installent ou plutôt leurs « œuvres ». Toutes les ruines qui composent cette scène sont saturés de tags signés par des tagueurs novices sauf un cherchant « à livrer un combat contre la société »(2). A l‘extérieur comme à l’intérieur de ces repaires. Le jour, les week-ends et pendant les vacances, cet endroit devient un lieu de promenade. Les fantômes sont partis se coucher et les touristes parcourent ces vestiges. Les anglais qui raffolent d’histoires gothiques ne trouvent pas dans ces décombres le point de départ à un conte fantastique.

La démolition est envisagée avant la fin de l’année 2016. Les carcasses d’habitation appartiennent au passé. Bien qu’effacées du paysage, elles ne resteront qu’un souvenir qui hantera la mémoire de certains propriétaires qui ont cru au père Noël.

Patrice Monchy, le 4 janvier 2017

(1) La Manche Libre du 27 août 2016

(2) Ken, tageur, sur un mur de NCY, 1996 (exergue dans le livre « La patience du franc-tireur », Arturo Pérez-Reverte)